Manger les orties revient à la mode. Ça tombe bien, car elles sont pleines de vertus pour la santé. Lorsque l'on parle des bénéfices thérapeutiques de l'ortie, on parle surtout de la grande ortie ou ortie piquante, urtica dioica, bien que sa petite cousine, l'ortie brûlante, urtica urens, a des propriétés similaires. Quoi qu'il en soit, ne les confondez pas avec le lamier blanc, parfois nommé "ortie blanche", qui ne pique pas. Le lamier blanc est aussi utilisé en phytothérapie, mais nous en reparlerons une prochaine fois.

Comment consommer ses orties sans se piquer ?
L'ortie fraîchement cueillie est urticante, cependant il existe différents procédés pour pouvoir la consommer sans se piquer.
D'abord, on va se munir de gants plutôt épais pour prélever et manipuler les orties. On préférera cueillir les feuilles les plus fraîches, mais éviter les plants hauts qui ont déjà fleuri. Il faudra ensuite séparer les feuilles de la tige et les laver soigneusement.
Pour les préparer en infusion, un séchage simple suffira.
Si l'on souhaite les manger cuites, il faudra les blanchir avant la cuisson. Pour les préparations crues, on les hachera très finement. Il existe de nombreuses possibilités pour les cuisiner : soupes, salades, pesto, quiches, jus etc... Vous trouverez plein de recettes sur internet, mais aujourd'hui nous allons nous concentrer sur les propriétés médicinales de l'ortie.
Usages traditionnels
On trouve à différentes périodes, de l'antiquité à nos jours, des récits de l'utilisation de l'ortie, presque considérée comme une panacée. La grande ortie, donnée en nourriture aux bêtes comme aux hommes, est un tonique dépuratif et astringent.
Le suc d'ortie était un remède à beaucoup de maladies, en particulier les hémorragies utérines.
On trouve dans les anciennes matières médicales que l'infusion et le suc d'ortie brûlant ont été conseillés contre les rhumatismes, la goutte, la gravelle, la petite vérole, la rougeole, les catarrhes chroniques, l'asthme humide, la pleurésie, etc. [...] J'ai vu employer avec avantage par des paysans, dans la gravelle, l'hydropisie, la jaunisse, la décoction de racines d'ortie et d'oseille. Cazin, traité des plantes médicinales, 1868
D'autres ont pu utiliser l'infusion d'ortie comme une lotion contre l'eczéma, l'urticaire ou le psoriasis. Un comble pour une plante qui pique ! D'autre part, on rapporte un usage de l'ortie en cure lorsqu'elle repousse au printemps, comme dépuratif et revitalisant.
L'utilisation la plus étrange de l'ortie ? "L'urtication", qui consiste à se flageller avec des tiges d'orties fraîches pour réveiller les désirs vénériens ou ramener quelqu'un qui vient de perdre reconnaissance. Je crois qu'on va pouvoir s'en passer.
Intérêt thérapeutique

Composition
De la feuille (utilisation principale) :
Flavonoïdes
Coumarines hépato-protecteurs et anti-inflammatoires.
Sitostérols : immunostimulants et qui seraient à l'origine de l'effet de la plante sur l'hypertrophie de la prostate.
Acides organiques : dont l'acide caféique qui inhibe les réactions inflammatoires dans les rhumatismes.
Chlorophylle
Minéraux et vitamines, en particulier du sélénium, d'où ses propriétés reminéralisantes souvent vantées.
Des racines :
Polysaccharides : Ça vous rappelle quelque chose ? Non ? Les polysaccharides sont les composantes principales des champignons médicinaux ! Beaucoup ont une fonction immunomodulatrice ; ils favorisent aussi le transit.
Flavonoïdes
Sitostérols, comme pour les feuilles.
Lignanes, qui réduiraient le risque de cancer du sein.
Immunité
La tisane de feuilles d'orties est fortement antioxydante.
Plusieurs études contre placebo en double aveugle ont montré les bénéfices de l'ortie contre la rhinite allergique.
Sphère urinaire
La tisane de feuilles d'ortie est diurétique et permet d'éliminer l'urée, l'acide urique et les chlorures. Traditionnellement, ces propriétés en faisaient donc un remède contre les crises de goutte.
Sphère génitale
Pour les femmes, les feuilles d'orties peuvent réduire les bouffées de chaleur liées à la ménopause. Un modèle animal a aussi montré un bénéfice potentiel contre l'endométriose, avec une réduction du volume des implants d'endomètre. Je n'ai pas plus d'information concernant une possible mise en pratique de cette découverte, mais il me paraît judicieux de proposer l'utilisation des tisanes d'ortie au moment des règles, et/ou pendant les crises de douleur. Enfin, les racines pourraient aider à soulager les congestions pelviennes, dans le cadre d'une consommation quotidienne sur quelques semaines, voire quelques mois.
Pour les hommes, sachez que les racines d'orties sont depuis longtemps utilisées contre les problèmes urinaires causés par l'hypertrophie bégnine de la prostate. Une consommation quotidienne pendant 6 mois permet de réduire les symptômes et de diminuer modestement la taille de la prostate.
Sphère digestive
Les bénéfices de la feuille d'ortie sur les maladies inflammatoires de l'intestin sont aussi surprenants qu'inattendus. 400 mg d'extraits hydroalcoolique d'ortie (=teinture) pris pendant 12 semaines pourraient ainsi réduire l'inflammation dans la maladie de Crohn et la colite ulcéreuse.
=> Pour un soulager l'inflammation intestinale on peut aussi utiliser le Shiitaké. Cliquez sur le lien pour plus d'infos.
Sphère hépato-biliaire
De nombreuses études ont montré que les feuilles de l'urtica dioica ont un pouvoir hépato-protecteur, suggérant que cet effet était dû à l'activité antioxydante de la plante.
Douleurs, articulations
Les feuilles d'orties sont anti-rhumatisantes, anti-inflammatoires, et légèrement antalgiques. Des études cliniques ont prouvé leur efficacité contre l'arthrite rhumatoïde et l'arthrose. Elles peuvent être prises en association avec les antalgiques et les anti-inflammatoires.
Métabolisme et cardio
Les feuilles d'ortie sont légèrement hypotensives et anti-hyperglycémiques.
Dans les campagnes, il était parfois coutume de consommer les orties au printemps pour se revitaliser. On retiendra leur effet reminéralisant et leur utilisation contre l'anémie chronique et le rachitisme.
Le silicium qu'elles contiennent est un chélateur de l'aluminium qui fait partie des métaux lourds, toxiques pour l'organisme. On peut donc consommer l'ortie dans le cadre d'une cure de chélation des métaux lourds.
Enfin, certaines études ont avancé que les feuilles pourraient aussi avoir un intérêt thérapeutique dans le traitement du diabète de type 2 sans qu'on sache encore exactement dans quelle mesure elles pourraient être utilisées.
Action contre le cancer
Quelques études ont mis en valeur les effets antiprolifératifs des feuilles d'orties contre les cellules cancéreuses (cancer du sein, cancer de la prostate).
Peau, cheveux, ongles
Les vertus antioxydantes de l'ortie sont telles que l'extrait d'ortie est étudié pour devenir un actif cosmétique contre le vieillissement de la peau. Le silicium contenu dans la plante stimule la production de collagène, qui donne à la peau sa souplesse et son élasticité. Il intervient aussi dans la formation de la kératine solidifie les ongles et les cheveux.
On vante souvent les mérites de l'ortie comme remède naturel contre l'acné. En réalité, il n'existe aucune preuve scientifique qui justifierait son usage oral pour ce problème dermatologique. En revanche, on pourra peut-être envisager l'extrait d'ortie tant qu'actif dans les cosmétiques naturels, mais cela reste à confirmer. Ce n'est donc pas vers cette plante que je me tournerai pour faire la guerre aux petits boutons.
=> Pour un remède oral à l'acné, on se tournera plutôt vers la bardane, ou les champignons médicinaux, tels que l'agaricus brasiliensis (articles à vernir).
Le Dr Valnet recommandait les racines bouillies dans du vinaigre comme tonique du cuir chevelu, pour stimuler la pousse et contre la chute des cheveux. Je vous recommande d'utiliser 1/4 de vinaigre de cidre et 3/4 d'eau, et non du vinaigre pur. On verse l'eau et le vinaigre bouillants sur quelques cuillères à soupe de racines, comme si on préparait une tisane. On se lave ensuite les cheveux et on utilise le mélange tiède, préalablement filtré, en eau de rinçage, 1 à 2 fois par semaine.

Dosages usuels
En infusion /décoction: 50g de feuilles ou de racines dans 1 litre d'eau, à boire sur 1 ou 2 jours. Les feuilles doivent infuser 20 minutes et les racines doivent bouillir 10 minutes.
Dans le commerce on trouve aussi des poudres, des extraits aqueux ou des teintures (plus rare) à base d'ortie. Respectez les dosages indiqués.
Aucune limite dans la durée d'utilisation n'a été fixée . Dans plusieurs études, 50g d'ortie par jour ont été utilisés pendant de longues durées, parfois plus de 6 mois.
Précautions d'emploi
La consommation d'urtica dioica est sans danger. Il pourrait y avoir des effets secondaires tels que des réactions allergiques mineures et une envie plus fréquente d'uriner (pollakiurie), ce qui est logique puisque l'ortie est diurétique. Ils seraient ressentis chez 1% des utilisateurs. Il faudrait cependant soumettre l'usage de l'ortie à un avis médical pendant la grossesse et l'allaitement, par précaution.
Prendre un avis médical si vous faites de l'hypotension. Il existe des rumeurs de contre-indication en cas d'insuffisance rénale mais rien ne semble les corroborer.
En s'intéressant aux plantes médicinales, on remarque rapidement que les mauvaises herbes ont souvent de nombreux bénéfices pour la santé, et servent dans de nombreuses recettes à boire ou à manger. Pendant les guerres et les famines, ces plantes sauvages ont nourri le bétail comme les hommes. Malgré l'abondance qui règne sur notre époque, je crois que nous devrions réfléchir deux fois avant de les jeter sur le composte, elles pourraient s'avérer plus utiles que nous le pensions.
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Autres sources
Contre le cancer :
Urtica dioica Extract Inhibits Proliferation and Induces Apoptosis and Related Gene Expression of Breast Cancer Cells In Vitro and In Vivo. Applied Surface Science. Volume 396, 28 February 2017, Pages 1499-1514
Aqueous extract of Urtica dioica makes significant inhibition on adenosine deaminase activity in prostate tissue from patients with prostate cancer. PMID: 15254411 DOI: 10.4161/cbt.3.9.1038
Allergies :
Randomized, double-blind study of freeze-dried Urtica dioica in the treatment of allergic rhinitis. PMID: 2192379 DOI: 10.1055/s-2006-960881
Nettle extract (Urtica dioica) affects key receptors and enzymes associated with allergic rhinitis. MID: 19140159 DOI: 10.1002/ptr.276
Comme hypotenseur :
Cardiovascular effects of Urtica dioica L. (Urticaceae) roots extracts: in vitro and in vivo pharmacological studies. Journal of Ethnopharmacology Volume 81, Issue 1, June 2002, Pages 105-109
Diabète :
Effect of Urtica dioica on memory dysfunction and hypoalgesia in an experimental model of diabetic neuropathy. Neuroscience Letters Volume 552, 27 September 2013, Pages 114-119
Comme anti-inflammatoire :
Cytokine secretion in whole blood of healthy volunteers after oral ingestion of an Urtica dioica L. leaf extract. Arzneimittel-Forschung/Drug Research Volume 46, Issue 9, 1996, Pages 906-910
Plant extracts from stinging nettle (Urtica dioica), an antirheumatic remedy, inhibit the proinflammatory transcription factor NF-κB. FEBS Letters Volume 442, Issue 1, 8 January 1999, Pages 89-94